Les objets connectés envahissent notre univers et des centaines de milliers de startups développent les projets les plus fous ; les grands groupes, bien que souvent dépassés par le mouvement, ne veulent pas rester à la traîne et investissent des sommes considérables en la matière. Mais de quoi parle-t-on réellement ?
Je ne me situe pas ici sur un plan technologique mais… sémantique : les Français parlent d’objets connectés là où les américains évoquent l’Internet des Objets – Internet of Things – et les plus branchés, l’IoT (prononcez Aï ô Ti, et pas « ail au thé », c’est imbuvable).
Objets connectés sous-entend une double connexion, des objets entre eux certes, mais bien évidemment des mêmes objets avec les être humains que nous sommes : quand nous parlons d’objets connectés, nous nous situons dans un monde fantastique, mais au sein duquel nous pouvons trouver notre place ; voire que nous pouvons dominer.
L’Internet des Objets nous en exclut : les objets discutent entre eux, tout comme nous échangeons entre nous sur notre Web ; dans ce nouvel espace, des décisions se prennent sans même que nous nous en doutions, ce qui ne peut que se révéler très anxiogène.
L’IoT nous libère de cette angoisse : incompréhensible comme tout acronyme, il nous transforme en expert ; seuls les vrais geeks l’emploient, et en prononçant les trois syllabes, nous pénétrons dans un cénacle (pas trop quand même, et de moins en moins) fermé.
Trois visions du monde et de notre destin… qui échappent complètement aujourd’hui au citoyen lambda : quand il n’est pas fan de technologie, il se montre plus que dubitatif sur le sujet, tous les sondages le montrent ; en fait, il attend que les industriels lui aient inventé des usages concrets et utiles, ce qui n’est pas encore tout à fait le cas, mis à part quelques exceptions comme le maintien à domicile des personnes âgées et/ou la télésurveillance des logements.
Pourtant les objets connectés vont très rapidement pénétrer dans nos appartements simplement parce que les autres objets … auront disparu. Prenez la télévision : on nous vend des smart TV (c’est-à-dire des TV connectées) mais bon nombre de téléspectateurs les utilisent comme des TV… normales – il faut reconnaître que la mise en route de certaines fonctions n’est pas des plus aisées.
Pourtant, cette omniprésence des objets connectés au sein de l’univers des consommateurs va certainement profondément changer non seulement nos modes de vie, mais aussi bien des métiers, comme celui des études de marché : les ethnologues s’imposeront de plus en plus aux côtés des psychologues, l’observation non intrusive complétant l’interrogation.
Aux instituts, mais aussi aux annonceurs de s’adapter ; car les bouleversements qui s’annoncent risquent d’être brutaux, un peu comme pour le téléphone mobile : en quelques années, les consommateurs qui n’y croyaient pas du tout (les études commandités alors par les premiers opérateurs le montraient nettement) se sont mués en utilisateurs gloutons.
Nul doute que demain, les mêmes, totalement indifférents aujourd’hui aux avantages de l’IoT, ne pourront plus s’en passer : la bascule peut être extrêmement rapide.