De la chaleur humaine dans un monde digitalisé ? Après bien des déboires, Amazon a enfin ouvert le mois dernier son magasin sans caisse Amazon Go. Par prudence, il se trouve juste au pied de l’un des gratte-ciels de son QG de Seattle, car on est encore loin de la fiabilité à 100% !
Les hypermarchés français n’en sont pas encore là – mais déjà, à défaut de supprimer les caisses, on supprime… les caissières : c’est le client qui fait le job, sans la moindre ristourne ! Et pourtant, l’enseigne économise un salaire.
Chez McDonald’s, vous commandez en ligne, via l’appli ou à une borne tactile dans le restaurant : il y a bien encore un employé pour vous remettre votre menu, mais pour combien de temps encore ?
Un soir, il y a quelques années, à New-York, je faisais la queue dans McDo juste derrière une vieille dame manifestement pauvre ; une fois son paquet payé, elle voulu laisser un pourboire au vendeur, qui le refusa et le mit dans un boite pour la Croix Rouge.
Puis vint mon tour : en discutant avec le serveur, celui-ci m’expliqua que la cliente venait très régulièrement plus pour s’acheter un peu de chaleur humaine que son repas, comme tant d’autres seniors isolés dans la grande ville.
Voilà le paradoxe du monde High Tech que nous construisent les GAFA : un univers peuplé de robots – pas des robots humanoïdes, non, des juste des capteurs et des AI qui conduisent des métros autonomes ; des magasins sans vendeurs, ni caissiers ; des barrières et des portes qui s’ouvrent parce qu’elles ont reconnus notre iris ; etc.
Un monde où les seniors vivront dans des appartements truffés de senseurs pour lancer l’alerte en cas de chute, en cas de malaise… et où ils s’ennuieront ferme ! Dans les maisons de retraite, certains patients déclenchent déjà volontairement leur alarme individuelle, juste pour pouvoir parler à quelqu’un !
Au Japon, des robots tiennent compagnie aux personnes âgées isolée, des robots aux apparences de petits animaux ; d’autres font du baby-sitting et commencent à aider les enfants à faire leurs devoirs.
McKinsey prévoit que l’automatisation entraînera la destruction de 375 millions d’emplois d’ici 2030 ; les Cassandre d’Oxford prévoient quant à eux la disparition de 47% des emplois aux Etats-Unis dans les 10 à 20 prochaines années, des comptables aux chauffeurs de taxis en passant par les gestionnaires de crédit et bien sûr… les caissiers.
On va créer des robots à tour de bras pour supprimer des emplois, et créer des déserts urbains ; et on va en créer d’autres, pour pallier notre solitude…
Je repense à la vielle dame croisée dans ce fast-food New-Yorkais : elle aura droit à un petit doudou robotisé pour rompre sa solitude, là où hier elle se contentait… d’un sourire !
Dans un tel monde, les marketers vont devoir s’attaquer à remettre une sacré dose d’empathie dans leurs produits et service : l’empathie, plus produit ultime du marketing ? Dans un monde aussi bizarre que celui qui se construit, c’est bien possible, hélas !