Olivier, tu as publié “Innover ou disparaître” pour lequel tu as remporté le prix du “Livre digital de l’année”. Tu es Directeur de l’innovation et de la transformation digitale au sein d’un grand groupe financier et as remporté en 2015 le prix Argus de l’assurance digitale de la « Meilleure stratégie interne pour la transformation digitale de l’entreprise ».
Un des freins à l’innovation en France, c’est souvent que l’on a du mal à accepter d’échec ; Churchill, que tu cites, disais : « Le succès est la capacité d’aller d’échec en échec sans perdre son enthousiasme » …
L’émergence de l’innovation, au sens une idée qui rencontre son marché de manière rentable, est semée d’embûches tant internes qu’externes à l’entreprise ; notamment culturelles venues de l’enfance.
Notre système éducatif traditionnel, tel qu’il est conçu depuis longtemps, peut en effet nuire à l’innovation.
Il a tendance à formater la pensée des élèves parfois au détriment du développement de la créativité des enfants, préférant la transmission top down, le bachotage, l’application stricte des règles à l’apprentissage de pair à pair par expérimentation, par essai erreur.
Et l’on retrouve ces principes et culture plus tard au sein des entreprises…
Le Lab est un espace qui permet à l’innovation de germer et de croître, protégée des aléas inhérents à l’innovation et à la culture du “parfait” qui peut empêcher la naissance de concepts déviants. Or une innovation est une idée déviante à son origine.
Tu préconises la méthode LISH : qu’est-ce qui se cache derrière cet acronyme ?
L’acronyme signifie L pour Lab, I pour Idéation, S pour Start-up et H pour Humain,
. Une structure autonome comme celle d’un Lab permet d’appréhender l’incertitude, de faciliter la réalisation d’expérimentations successives et d’accepter son corollaire qu’est l’échec
. Pour innover, il faut créer les conditions propices et des pratiques favorisant l’émergence d’idées neuve en mettant en place une culture de l’innovation ouverte sur l’extérieur (open innovation)
. Insuffler les pratiques et méthodes des start-up dans les grandes entreprises est une des voies à suivre pour les aider à retrouver le chemin de l’innovation; notamment au sein du Lab
. Même si la création d’un Lab permet d’appréhender et d’accélérer l’innovation, l’entreprise doit mobiliser l’ensemble des collaborateurs. Se réinventer et survivre à l’ère de la révolution digitale est d’abord une question de transformation culturelle
La phase la plus complexe est celle d’idéation …
Oui car la mise en place d’une culture de l’innovation prend du temps et nécessite un effort constant, cela requiert également une grande cohérence entre l’ambition et les actions au quotidien.
De plus l’entreprise doit créer un écosystème ouvert, dans et autour de l’entreprise en s’appuyant sur ses collaborateurs, des partenaires technologiques, des start-up, des écoles, des universités et des incubateurs, sans oublier de co-construire avec ses clients.
Tu préconises « l’innovation frugale » : trop de moyens tue l’innovation ?
On peut le penser et à l’image des artistes, évoluer dans un monde contraint peut démultiplier la créativité et le système D pour sortir des sentiers connus et imaginer des solutions alternatives nouvelles.
Une fois l’innovation trouvée, testée, prête à la mise en œuvre, comment faire en sorte que la structure de l’entreprise ne l’étouffe pas ?
Il faut à mon sens sanctuariser un budget pour industrialiser les innovations.
Sans cela le processus budgétaire classique trouvera toujours le moyen de reporter au milieu, de tuer au pire les innovations, lui préférant le réglementaire et des développements sans risque.